Solder les comptes ?, par Mohamed Abdoun

Depuis longtemps, depuis toujours serait-on carrément tentés de dire, les relations entre l’Algérie et la France ont été passionnelles. Il faut dire que le passé commun qui nous lie, à notre corps défendant il faut le dire, n’est pas une chose que l’on peut oublier facilement. Il faut dire, surtout, que la France, depuis que l’Algérie a arraché son indépendance de haute lutte et au prix d’énormes sacrifices, n’a absolument rien fait pour aider à cicatriser ces blessures mal-cicatrisées et ce traumatisme dont a souffert notre peuple pendant près d’un siècle et demi. 
C’est sous ce prime précis, sans doute, qu’il convient d’appréhender le message adressé ce vendredi par le président algérien à son homologue français. Diplomatie et (nouveau) processus de rapprochement entre les deux pays, Bouteflika use de termes diplomatiques pour évoquer cette question, sans pour autant céder d’un pouce sur des questions de principe chèrement payées durant notre guerre d’indépendance nationale.  » Les relations entre l’Algérie et la France ont précédé la période coloniale qui a marqué plus particulièrement notre histoire commune et laissé des traces durables chez nos deux peuples « , écrit ainsi le président Bouteflika à son homologue français. Un double sens peut en être tiré. D’une part, le chef de l’Etat rappelle que, contrairement aux assertions de la France, longtemps soutenues, l’Algérie a existé en tant qu’Etat souverain et indépendant avant sa colonisation en 1830. De l’autre, ce fameux colonialisme, particulièrement criminel et inhumain, que le chef de l’Etat qualifie de  » passé commun « , a fini par laisser des traces durables chez nos deux peuples. Il ne s’agit rien moins, ici, que de traumatisme dont souffre encore tout un peuple, alors que l’indépendance, arrachée de haute lutte, a donné lieu aux pires exactions de la part des extrémistes terroristes de l’OAS, empêchant ainsi toute vie commune entre Algériens et Pieds noirs, forcés de quitter précipitamment l’Algérie postindépendance. 
Aujourd’hui, alors que le chef de la diplomatie française se trouve en visite en Algérie, et que des dossiers particulièrement lourds devraient être discutés, il semble qu’il soit temps que Paris fasse au moins le premier pas en direction de la reconnaissance de ses crimes, afin que ses relations avec notre pays redémarrent sur des bases assainies et, forcément, constructives pour tous. 
Il est temps d’en finir avec cet esprit paternaliste, basé sur le sentiment malsain du  » paradis perdu  » qui fait agir la France, près d’un siècle après le début des chutes des empires coloniaux, comme si elle se trouvait toujours en territoire conquis.
L’exemple le plus édifiant à ce propos a certainement trait à l’actuelle crise malienne, dont le déclenchement et l’aggravation ont été causés par la France lorsqu’elle a décidé d’attaquer la Libye de manière irréfléchie. 
Toujours est-il que dans le cas présent l’Algérie ne se trouve pas en position de demandeur mais bel et bien dans celle de commandeur. La crise de l’Euro, qui risque de faire basculer l’Occident vers des années pires que celles de la récession des années 30, pousse en effet les Etats représentant ces pays à se tourner tout naturellement vers les pays émergents comme le nôtre…

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