Les fondements stratégiques de l’intégration maghrébine (IV)

Ensembles politiques Fondée le 17 février 1989 à Marrakech, l’UMA ne cesse, depuis, de faire du surplace. Les responsables des cinq pays membres (Algérie, Libye, Maroc, Mauritanie, Tunisie) continuent certes de se rencontrer périodiquement et de développer une coopération bilatérale dans plusieurs domaines, mais sans amélioration substantielle sur le plan des échanges économiques.
Mais du fait de la rigidité de la gestion, ce n’est pas parce qu’il y a des ressources que le financement est plus facile pour les entreprises souvent non bancables, les banques privilégiant l’importation. Ce qui suppose d’autres modes de financement, sans, bien entendu, renier les instruments classiques adaptés à certains secteurs afin de dynamiser les projets facteurs de croissance dont le retour du capital est lent et dont la rentabilité n’est qu’à moyen terme, dont, par exemple, l’extension du crédit bail qui est en fait une sous-traitance dans l’achat de biens et la gestion de prêts, le crédit-bail étant souvent considéré comme un substitut de l’endettement tant des entreprises que des particuliers écartées des formes traditionnelles d’emprunt en raison de leur risque. C’est que les petites et moyennes entreprises (PME) jouant un rôle vital dans le développement économique, par l’accroissement de la concurrence, la promotion de l’innovation et la création d’emplois, sont souvent confrontées à plusieurs défis en matière de croissance, qui varient des environnements macroéconomiques peu favorables aux barrières administratives et à la bureaucratie. Toutefois, le plus grand obstacle demeure peut-être leurs capacités limitées à avoir accès aux services financiers. Les financements bancaires à long terme habituels sont généralement inaccessibles pour les PME, faute de garanties, ce qui rend les actifs mobiliers peu sûrs pour l’accès au crédit. Cette situation, ajoutée au niveau élevé des coûts de transaction liés à l’obligation de vigilance, amène les banques commerciales à continuer de privilégier les prêts aux marges, les entreprises bien établies. Dès lors, le crédit bail pourrait être un complément comme moyen de financement pour certains biens d’équipements en particulier pour les entreprises plus petites qui n’ont pas une tradition de crédit ou qui ne disposent pas des garanties requises pour avoir accès aux formes habituelles de financement. Comme d’ailleurs, il faudrait songer à impulser le marché de la finance islamique qui a bien résisté à la crise mondiale ayant atteint au niveau mondial les 1 000 milliards de dollars dès 2010 et étant appelé à croître. D’ailleurs, certains savants musulmans ont pu émettre l’idée du cycle de d’investissement concernant la durée de détention d’un titre de société intervenant par exemple dans le domaine agricole qui correspond au temps nécessaire pour semer, récolter et commercialiser, la décision de vente du titre étant alors justifiée par une véritable stratégie d’investissement mesurée par le retour sur investissement post-cycle de récolte. L’objectif de la réforme du système financier, condition d’accompagnement de la politique industrielle, est de promouvoir l’investissement dans des actifs tangibles, les investissements devant être adossés à des actifs réels, le banquier ne devant pas être seulement prêteur mais co-investisseur et partenaire du projet financé, ses revenus correspondant à une quote-part des résultats issus du projet financé, permettent d’atténuer le risque selon le principe des 3P (partage des Pertes et Profits) ? 3.2- Quelle stratégie de la privatisation comme facteur d’investissement ? Force est de reconnaître que le grand problème au Maghreb reste la dynamisation du tissu productif. La solution pour relancer l’activité économique n’est-elle pas de combiner la démonopolisation et la privatisation, s’agissant de ne pas avoir une vision négativiste vis-à-vis des entreprises publiques qui évoluent dans un environnement concurrentiel. Il y a lieu de ne pas confondre démonopolisation à travers l’encouragement à l’investissement neuf, avec la privatisation qui à la lumière des expériences historiques peut être définie soit comme un transfert partiel ou total vers la propriété privée, ou un transfert du management et comme restructuration globale de l’économie. Il s’agit d’éviter la vision micro- statique de restructuration industrielle pouvant toucher certes l’industrie mais également, l’agriculture, les banques, les services et certains segments dits biens publics où est introduit la mixité. Il est complémentaire à la démonopolisation en impulsant des segments nouveaux des secteurs privés réduisant ainsi dans le temps la part du secteur public, permettant la transition vers l’économie de marché. La question qui se pose est la suivante : la privatisation s’assimilerait-elle à un simple transfert de propriété ou n’est-elle pas l’instrument privilégié de la restructuration de l’outil de production permettant l’accroissement de la valeur ajoutée interne dans le cadre d’une libéralisation maîtrisée ? Comme toute comparaison doit être replacée dans son contexte historique évitant de comparer la mixité au niveau de certains pays du Maghreb avec une mixité de l’économie occidentale qui est dominée par le mode de gestion privée dans un environnement mondial concurrentiel. Il s’agit pour rendre opérationnel ce processus complexe d’avoir une vision globale donc systémique inséparable de la politique socio-économique d’ensemble. C’est dans ce contexte que la réussite de ce processus complexe implique de tenir compte tant de l’environnement national qu’international. Les objectifs de la privatisation, qui est avant tout un processus éminemment politique, entraînant un bouleversement systémique, les gagnants d’aujourd’hui n’étant pas forcément ceux de demain, d’où des résistances assimilant souvent privatisation à bradage du patrimoine national, à des fins d’ intérêts de rente, demandent un minimum de consensus social et politique. Ils peuvent varier et être adaptés en fonction de l’activité ou de l’entreprise. Se pose d’ailleurs cette question : avec des politiques économiques divergentes des différents pays du Maghreb, peut-on avancer dans l’intégration ? 3.3- Les actions à court terme. Concernant les perspectives à court terme , si je me place du côté de l’Algérie, les opportunités sont également immenses pour la reconstruction de la Libye, pouvant cibler bon nombre de segments ou la complémentarité est possible en rappelant l’ambitieux programme de la dépense publique de 286 milliards de dollars entre 2010/2013 avec des réserves de change estimées en janvier 2012 à 190 milliards de dollars et estimées selon le FMI à 2005 fin 2012. Par ailleurs, si en 2000, la dette extérieure algérienne était d’environ 40 milliards de dollars et le service représentait 30% des recettes d’exportation, en 2012 l’Algérie a maintenu un très faible degré de dette totale selon le FMI à 3,8 milliards de dollars en 2009 à 2,8 milliards mds en 2010 et à 2,2 mds en 2011. La dette extérieure brute de l’Algérie représente 2% du PIB en 2011 et devra reculer à 1,7% en 2012 tandis que la dette publique devrait baisser à 8,9% du PIB en 2012 et à 8,6% en 2013 (contre 9,9% en 2011). Je ne citerai que certains segments
structurants où la coopération serait possible en m’en tenant aux grosses masses : – Au niveau de Sonatrach où il est prévu de dégager une enveloppe d’environ 80 milliards de dollars entre 2012/2016 et 40/50 milliards de dollars au niveau de Sonelgaz entre 2012/2020 sans compter 60 milliards de dollars pour les énergies renouvelables étant prévu une modification partielle de la loi des hydrocarbures prochainement, selon le ministre de l’Energie algérien . – Dans la dynamisation de bureaux d’études pluridisciplinaires complexes, la balance de paiement algérienne montrant une sortie de devises 10/11 milliards de dollars/an entre 2009/2010 et allant vers 12 milliards de dollars 2011/2012, ce qui suppose une coopération dans le domaine de la formation/éducation par la création de partenariat pour des grandes écoles spécialisées et universités. – Dans la fabrication de pièces détachées dont les importations avoisinent plus de 3 milliards de dollars concernant tant Sonatrach/ Sonelgaz, les principaux donneurs d’ordre et également le parc automobile en Algérie qui est estimé à plus 4 millions de véhicules (dont plus de 60% véhicules de touristes ), l’Algérie possédant le deuxième parc le plus important d’Afrique après l’Afrique du Sud et le premier rang des pays maghrébins. – Dans le domaine des médicaments dont les importations ont avoisiné 1,87 milliard de dollars en 2011 et globalement dans le secteur de la santé. Dans le développement des services notamment l’informatique et les nouvelles technologies, sans compter les relations touristiques, qui constituent un marché potentiel. – Dans certains segments agro-alimentaires tenant compte des avantages comparatifs mondiaux, étant dans une économie ouverte la facture alimentaire algérienne a été de 10 milliards en 2011. – L’Algérie disposant de peu d’entreprises performantes dans le bâtiment, travaux publics, hydraulique (l’eau, cet or bleu qui sera un enjeu majeur dans les années à venir au Maghreb) expliquant la percée notamment de la Chine alors que plus de 50% du programme 2010/2014 est consacré à ce secteur, des perspectives peuvent être envisagées. – Dans le système financier/assurance par des partenariats ciblés banques/assurances algériennes/banques/assurances françaises, l’assistance bancaire pour une engeerening financière inexistante en Algérie associant nos compétences émigrées en vue de la création d’une bourse maghrébine supposant la résolution de la distorsion des taux de change. – Plus globalement, pour les pays du Maghreb, on peut imaginer du fait de l’acquisition du savoir- faire tunisien et marocain le développement de la filière textile/cuir maghrébine, de la filière poisson par l’apport de la Mauritanie, de grands complexes combinant le phosphate marocain et le gaz algérien, des segments dans l’agro-alimentaire, des unités pétrochimiques du savoir algérien couplant les réserves importantes du couple Libye/Algérie, de puissantes industries sidérurgiques grâce à l’important gisement de fer à faible teneur et à ciel ouvert de Gara Djebilet ( région de Tindouf/Béchar) sous réserve de la résolution du conflit du Sahara occidental, qui devra être résolu dans le cadre des Nations unies, la fermeture des frontières entre le Maroc et l’Algérie depuis 1994 , limitant la libre circulation des biens de la sphère réelle ( les transactions informelles n’ayant jamais été aussi florissantes) et des personnes, frein à l’intégration. Il est entendu qu’il y a lieu de cibler les PMI/PME qui satisferont le marché intérieur maghrébin entre maghrébins et des partenariats avec des firmes internationales pour promouvoir les exportations ce qui suppose un cadre juridique stable et unifié, et ce tenant compte d’une économie ouverte(coûts/qualité). (A suivre)
ABDERAHMANE MEBTOUL

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