A GHAZA, IL N'Y A QUE DES CHIENS ECRASES

par K. Selim
Il faut armer Ghaza ! Cette idée, dérangeante, perturbante, coupable de «manquer de tact», c’est un Palestinien, Abdelbari Atwan, qui l’a émise en direction de l’Arabie Saoudite et du Qatar. Deux pays qui, ainsi que personne ne l’ignore, fournissent déjà des armes à l’opposition syrienne en lutte contre le régime de Bachar Al-Assad. Ceux qui lisent régulièrement Al-Qods Al-Arabi savent que M. Atwan n’est d’aucune complaisance à l’égard du régime de Bachar Al-Assad. 
Son appel, qu’il sait vain, à armer Ghaza n’est pas destiné à faire de la contre-propagande en faveur de la dictature syrienne. C’est celui d’un Palestinien indigné qui ne peut s’empêcher de constater – et nous avec lui – que les meurtres que commet Israël contre les siens à Ghaza sont en train de passer sur les chaînes de TV «révolutionnaires» du Qatar et de l’Arabie Saoudite dans la rubrique des chiens écrasés. Il constate aussi qu’aucun responsable arabe n’a eu l’ombre d’un état d’âme en entendant une porte-parole du département d’Etat américain dénonçant vigoureusement les «terroristes» palestiniens qui se font massacrer. Les malheureux Syriens qui font face à la répression du régime en place ont beaucoup «d’amis» qui bougent, fournissent des armes, mettent des chaînes satellites à disposition. 
Certains Etats arabes dénoncent même avec une vigueur remarquable l’usage «immoral» du veto par les Russes et les Chinois… Ce serait fastidieux d’énumérer le nombre de veto américains contre des résolutions du Conseil de sécurité sur le dossier palestinien. Il est facile de constater que les dénonciations arabes contre le veto US sont rares et d’une mollesse qui tranche avec la sévérité des admonestations adressées à Moscou. Il est clair que tous les peuples finissent pour des raisons plus ou moins morales à se trouver des «amis» chez les puissants. Sauf les Palestiniens. Ils ont droit à des discours sans fin. Des régimes arabes font parfois, sans agir, dans la surenchère verbale sur la cause des Palestiniens. Cela ne change rien au fait que depuis 64 longues années les Palestiniens sont seuls, sans amis. Sans frères. Et cela fait des décennies qu’ils mènent un combat inégal et se heurtent à l’intransigeance des Américains sans que les Arabes se décident à dire basta. C’est plus aisé de s’attaquer aux Russes, ces «athées», ces «communistes sans Dieu», n’est-ce pas ? 
Cela fait 64 longues années que les Palestiniens se font tuer et se font traiter de terroristes. Pourquoi donc n’auraient-ils pas droit, comme les Tunisiens, les Egyptiens et les Syriens, à leur «printemps»? Les gouvernements arabes ne peuvent même pas justifier leur silence actuel par le fait que des groupes palestiniens auraient pris l’initiative de rompre le cessez-le-feu de fait qui régnait à Ghaza. Cette rupture est venue d’Israël qui a assassiné un dirigeant des comités de résistance populaire. Il y a eu une réunion de la Ligue arabe. Elle n’était pas «officiellement» consacrée à Ghaza mais à la Syrie et donc la Ligue arabe n’a rien dit sur le sujet ! La Ligue des Etats arabes respecte scrupuleusement son ordre du jour, il n’est pas question de se laisser entraîner dans ces agaçantes infos sur les chiens écrasés de Ghaza. 
Non, les Arabes n’ont rien à dire ! Le Qatar et l’Arabie Saoudite ne donneront pas des armes à Ghaza. Il ne peut en être question même si Hamas a pris le risque de faire valoir son appartenance idéologique en s’alignant avec les régimes du Golfe et les Frères musulmans contre la Syrie et l’Iran. Il n’en peut être question car les Palestiniens font l’objet d’un veto américain permanent qui, pour les régimes du Golfe, ne peut être ni contesté ni dénoncé.

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