Relations Algérie-France : Macron évoque des résistances et encense Tebboune

Une semaine après le report sine die de la visite que devait effectuer à Alger le premier ministre français, Jean Castex, le président Emmanuel Macron a donné sa version des faits. Dans une interview accordée au journal le Figaro, il estime qu’il existe, des deux côtés, une « volonté » de régler le contentieux historique. Mais il met en cause des résistances. « Je crois (…) que cette volonté est très largement partagée, notamment par le président Abdelmadjid Tebboune. Il est vrai qu’il doit compter avec quelques résistances… », déclare le chef de l’Etat. C’est dans ce sens qu’il qualifie ainsi d’« inacceptable » la déclaration du ministre du Travail, Hachemi Djaaboub, qui a affirmé que la France était « l’ennemi traditionnel et éternel » des Algériens. Au-delà du conflit mémoriel, le président Emmanuel Macron y voit « un problème franco-français ».

« Ne vous y trompez pas, derrière le sujet franco-algérien il y a d’abord un sujet franco-français », affirme Emmanuel Macron. « Au fond, nous n’avons pas réconcilié les mémoires fracturées ni construit un discours national homogène (…) La mémoire fracturée, c’est celle des pieds noirs (Français d’Algérie rapatriés en 1962, ndlr), celle des harkis, celle des appelés du contingent, celle des militaires français, celle des Algériens venus ensuite en France, celle des enfants de cette migration, celle des binationaux… », A-t-il dit. Mais, « Je ne suis ni dans la repentance ni dans le déni. Je crois dans une politique de la reconnaissance qui rend notre nation plus forte », ajoute-t-il.

Quelques heures avant cette interview présidentielle française, le conseiller du président de la République, Abdelmadjid Chikhi a indiqué que la France coloniale avait éliminé les intellectuels algériens. « La France coloniale a œuvré pour répandre l’analphabétisme en Algérie », a-t- accusé à l’occasion de la célébration du « Jour du savoir ». Il a souligné, en citant « les historiens », sans les nommer, qu’au début de la colonisation française, en 1830, « le taux d’analphabétisme n’approchait pas les 20% de la population ». « Et tous les Algériens lisaient et écrivaient. Pendant les trente premières années de colonisation, la France avait éliminé les personnes qui lisaient et qui écrivaient. Il s’en est suivi l’ère du pillage », a accusé Abdelmadjid Chikhi.

La semaine dernière, le ministre du Travail, Hachemi Djaaboub, avait qualifié la France de « ennemi éternel » de l’Algérie. Une déclaration qualifiée par le secrétaire d’Etat français aux affaires européennes de « paroles excessives dans les relations franco-algériennes ». Mais cela ne devait pas justifier le rappel de l’ambassadeur français d’Alger.

Akli Ouali

L’Est Républicain, 20 avr 2021

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