Lettre adressée à une amie marocaine

Chère amie, avec toute l’amitié que je te dois, je me dois de te dire toute ma déception, mon amertume voire ma perplexité en lisant et relisant ta réflexion sortie de nulle part, tant j’ai appris de toi l’humanisme, la solidarité et la justice. Tu n’as pas émis là une simple opinion personnelle qui vaut ce qu’elle vaut, mais un réquisitoire qui déchire, qui défait et taillade tous les liens d’amitié et de fraternité qui lient depuis des millénaires les deux peuples de ce Maghreb qui appelle à une refondation fraternelle.

La manière, la façon de t’adresser à tout un peuple manque de mesure, de déférence, de considération en même temps qu’elle attriste, afflige, contrarie tant de tes amis même si, quelque peu prudente et pointilleuse, tu affirmes t’adresser à une infime patrie de ce peuple. Le peuple algérien comme la nation marocaine est un tout, une unité riche de par sa diversité ; comment le réduire en strates ! Il ne semble à personne qu’il puisse exister un seul marocain comme un algérien qui accepterait voir son concitoyen discrédité, amoindri du surcroît en public, en raison de sa nationalité. Ceci étant dit, le peuple algérien a ses propres insuffisances, comme tant d’autres peuples (qui n’en manquent pas), qui tente de les corriger tant bien que mal ; faut-il préciser que ça le concerne seul au premier chef ; il a aussi des blessures qui s’échine en mettant beaucoup d’énergies et combien de forces à les panser ne souhaitant nullement voir entrouvertes d’autres déchirures avec son voisinage mais ayant au contraire beaucoup d’espérances qu’il entend partager.
Chère Khadidja, tu agis comme un psychanalyste de groupe en diagnostiquant avec une telle précision des maux innommables, innombrables, o combien de torts dont tu épargnes tous les autres sans citer une qualité, une seule dont tu affubles à contrario autant d’autres alors qu’on attend l’un de l’autre communion et sympathie !
Dis moi, quelle est la nation qui fuit et oublie son passé que toi tu demandes à enterrer, à absoudre ?

Point de haine, Madame, le peuple algérien n’a de dent ou d’aigreur envers aucun peuple, surtout pas envers son voisin marocain avec lequel il a en partage culture et histoire, avenir et communauté de destin.

Tu ne peux pas, par ailleurs, amie, d’une part exiger de tout un peuple de faire une « pause » lorsque l’histoire s’accélère et d’autre part, l’accuser de stagnation.
Que dire encore de ce regard que tu qualifies d’obsolète, d’usé, de désabusé d’algériens « tournés vers le passé, leur passé » en les conseillant de se tourner vers l’avenir …Chère amie, quel avenir tu leur suggères.

Hostilité, non jamais ! Les jeunes algériens comme tous les maghrébins, voyagent beaucoup et s’installent un peu partout, chez vous aussi faut-il le préciser ; Cette jeunesse n’est imprégnée ni n’éprouve d’aucune animosité ni n’est porteuse d’une certaine adversité à l’encontre de ses prochains.

Otage dis tu ! Comment un peuple aussi fier et jaloux qui a payé le prix fort pour préserver cette valeur acquise avec tant et autant de douleurs puisse passer à l’indignité et au déshonneur. Puisse cette brouille et celles nombreuses à venir ne pas nous diviser plus, ni nous distraire à jamais des défis et intérêts communs. Notre fraternité mise à l’épreuve encore une fois sera plus forte grâce à cette résilience héritée de notre vaillance. J’espère ardemment comprendre que tu as agi sous une colère et une contrariété passagères dissipées aussi vite et souhaite te voir reprendre ta sagesse, toute ta sérénité, celle de cette personne qui a toute mon estime appartenant à un peuple qui a égards et respect.

Amicalement,

Source : Sétif.info, 16 deç 2020

Tags : Maroc, Algérie, Maghreb, fraternité,

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