Sahara Occidental : Comment le Maroc a apprivoisé la MINURSO

En 2015, le Parlement français a approuvé une loi qualifié de « protocole d’entraide franco-marocaine » qui a signé la fin de la brouille entre la France et le Maroc provoquée par la convocation d’Abdellatif El Hammouchi, ex-patron des services secrets marocains. Sa principale disposition ? En cas d’enquête ouverte en France sur des crimes commis au Maroc ; même si la victime est française, le procureur aura l’obligation de transmettre la procédure « en priorité » aux autorités marocaines. « A elle de décider de la suite. Autant dire qu’il sera impossible de poursuivre des dignitaires marocaine en France », soulignait le Canard Enchaîné à l’époque.

Selon les politicards français, la signature de cette loi a été dictée par « l’alliance stratégique » qui caractérisent les relations entre la France et le Maroc. Un langage qui cache les raisons expliquant le fait que toutes les élites françaises soient à la merci du Makhzen.

Politiciens, journalistes, artistes… ont été invités à séjourner au Maroc aux frais des autorités marocaines à La Mamounia et à d’autres hôtels de luxe où un agent de la DST est souvent affecté et des caméras installées pour filmer leurs moindres gestes. Rappelez-vous l’histoire de «l’ ancien ministre » qui s’était « fait poisser à Marrakech dans une partouze avec des petits garçons », d’après les propos de l’ancien ministre de l’Éducation nationale Luc Ferry. C’est une pratique habituelle des services secrets marocains. Il semble que c’est la seule pratique qu’ils maîtrisent puisqu’elle est utilisée contre toutes les voix critiques. La dernière en date : l’avocat Mohamed Ziane, ancien ministre des droits de l’homme et fondateur du parti marocain libéral. Il a été filmé nu et à son insu dans une chambre d’un hôtel de Rabat. « Ce sont des méthodes choquantes de basse police un peu inhabituelles au Maroc », affirme maître Patrick Baudouin, l’un des avocats du boxeur Zakaria Moumni que les services de Sa Majesté ont voulu museler par la même méthode. Selon le journaliste marocain Ali Lmrabet, « le ministre de l’intérieur de l’époque Mohand Laenser a reconnu publiquement que les Renseignements généraux (RG) avaient filmé l’ancien champion du monde Zakaria Moumni avec son épouse légitime dans une chambre de l’hôtel Hassan de Rabat ».  

Le chantage au vidéos sexuel, la DST en possède une solide expérience et au Sahara Occidental la MINURSO n’ a pas échappé. Depuis ses premiers moments , la mission est tombée dans le piège marocain. Si les murs de l’hôtel El Massira parlaient, ils auraient beaucoup à raconter des jeunes filles marocaines qui ont été invitées à « gâter » les officiers de la mission onusienne. La population locale en sait quelque chose. Non sans raison, le Conseil de Sécurité insiste dans toutes ses résolutions sur «  la politique de tolérance zéro de l’Organisation des Nations Unies à l’égard de l’exploitation et des atteintes sexuelles et de le tenir pleinement informé des progrès faits par la Mission à cet égard dans ses rapports » .

Ceci explique en partie les nombreux documents confidentiels de la MINURSO en possession des services secrets marocains et qui ont été révélés par le hacker Chris Coleman.

A titre d’exemple, nous citons cette lettre du Chef de la mission Hany Abdelaziz dans laquelle il fait part de la nomination du français Hervé Ladsous (encore un français) au poste de vice-secrétaire général de l’ONU chargé des missions de paix (DPKO).

Ou encore cette lettre reçu par le Chef de la MINURSO de la part d’une équipe de télévision japonaise demandant la permission de visiter le siège de la mission à Tifariti.

Ou encore cette lettre d’Omar Manis dans laquelle il rapporte les mesures prises par l’Algérie et le Front Polisario suite à l’affaire de deux coopérants espagnols et une italienne, kidnappés à Rabouni en 2010.

Même les bureaux du Chef de l’ONU étaient infiltrés par les marocains. Dans une lettre envoyée par Lotfi Boucharaa, ancien chef de section au ministère marocain des affaires et ambassadeur actuel du Maroc à Moscou, il faisait part d’une source qu’il appelait « nos sources au sein du Secrétariat » de l’ONU. Il s’agit des « éléments de langage sur la thématique des droits de l’homme préparés à l’attention du SG de l’ONU pour son entrevue avec Mohamed Abdelaziz ».

Dans un email reçu par Nasser Bourita de la part d’Amine Chabi, ce dernier rapportait des confidences faites par Kishore Deraya, Directeur adjoint politique au Cabinet du SG :

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