Un ex-prisonnier politique sahraoui dénonce l’instrumentalisation de la menace terroriste par le Maroc.

Profitant de l’état de confinement provoquée par la pandémie de covid-19, le gouvernement marocain a tenté de faire approuver par le Parlement un projet de loi visant à serrer l’étau autour de l’utilisation des réseaux sociaux portant ainsi une grave atteinte à la liberté d’expression.

Craignant la fermeture de cette espace de liberté après l’approbation du projet de loi 22.20 par le Conseil de Gouvernement le 19 mars 2020, l’activiste des droits de l’homme sahraoui, Mohamed Abdelmoula Dihani, a saouhaité laisser un témoignage audio-visuel sur ce qu’il a vécu dans la prison marocaine de Temara et dénoncer les pratiques des services secrets marocains visant à instrumentaliser la menace terroriste pour des visées politiques et pour raffermir son occupation du Sahara occidental.

En avril 2010, Dihani se trouvait à la ville d’El Aaiun, capitale du Sahara Occidental occupée par le Maroc. Il était arrivée d’Italie à l’occasion de la libération d’un de ses proches parents.

Le 28 avril, il est sorti pour fumer une cigarette et a été interpellé par des agents des services secrets marocains, menotté, embarqué dans un véhicule et amené au post des renseignements sis à l’Avenue de la Mecque. De là, il a été conduit à la prison de Temara où, selon lui, se trouvait, à l’époque, le bureau d’Abdellatif El Hammouchi et où étaient planifiées toutes les opérations destinées au territoire du Sahara Occidental et la création et prétendu démantèlement de cellules terroristes en vue de faire pression sur certains pays et obtenir leur soutien, dont l’Union Européenne et les Etats-Unis.

Dans une cellule, complètement dénudé et menotté, son calvaire a été illustré par le dessinateur marocain Abdellatif Zeraïdi (voir images ci-jointes)

Après 3 jours de supplices, il a été conduit dans un bureau d’interrogatoire où il y avait Abdelhak Alkhiam, le nº 2 de la DST, et le général Abdelaziz Bennani, commandant de la région sud.

« Tu vas nous dire où tu as caché les armes que tu as introduites de l’Algérie ou de la Mauritanie», lui disaient-ils.  « Nous avons des informations sûres que tu as introduit des armes. Nous voulons pas te garder en prison. Tout ce que nous souhaitons c’est que tu nous dises où se trouvent ces armes. Nous savons où elles se trouvent et nous savons qui étaient avec toi et comment vous l’avez introduites », ont-ils affirmé.

Après avoir nié toutes ces accusations, il a été reconduit dans sa cellule pour subir de nouvelles séances de tortures les plus cruelles. Ils lui ont proposé 10 millions de DH (1 million de dollars) s’il acceptait de travailler avec eux et jouer le jeu qui consiste à recruter, sous les directives des services de renseignement marocains, un groupe de personnes qui, selon eux, avait des idées radicales et les amener au Sahara Occidental. L’objectif était d’accuser ce groupe de vouloir attenter contre la MINURSO ou des personnalités sahraouies connues pour leur défense des thèses marocaines et commettre un attentat terroriste dans le territoire sahraoui et présenter les sahraouis comme une menace potentiel pour les intérêts des Etats-Unis et de l’Europe.

Suite à la condamnation par la communauté internationale de la violente répression qui a accompagné le démantèlement du camp de Gdeim Izik le 8 novembre 2010, les autorités marocaines ont annoncé le 5 janvier 2011, l’arrestation de 27 personnes, « dont un membre d’al-Qaïda au Maghreb islamique », dans le cadre de la prétendue « cellule d’Amgala », une localité sahraouie se trouvant à la limite entre les territoires sahraouis occupés par le Maroc et ceux contrôlés par le Front Polisario. « C’est la première fois que le Maroc fait état de l’arrestation d’un membre actif d’AQMI sur son territoire », indique une dépêche de Radio France International.

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Après sa rencontre avec les accusés, Dihani raconte qu’ils affirment avoir été manipulés par l’État marocain, qu’ils étaient loin de porter des idées intégristes et que la majorité de ce groupe n’était pas pratiquant (ils n’accomplissaient pas la prière).

Mohamed Dihani est convaincu que ses bourreaux avaient l’intention de l’impliquer dans cette mascarade destinée à diaboliser les sahraouis.

Pendant son séjour dans la prison de Temara, M. Dihani a rencontré de nombreux marocains innocents qui se trouvaient en prison après avoir été manipulés par les services secrets marocains en vue de commettre des attentats au Maroc. Parmi eux, des auteurs des attentats de Casablanca (2003) qui lui ont assuré que le commanditaire de cette opération n’a pas été arrêté en raison de son appartenance aux services de sécurité marocains.

Entre décembre 2011 et mars 2012, il a aussi rencontré Adil El Othmani, l’auteur présumé de l’attentat contre le Café Argana (avril 2011), à Marrakech qui lui a assuré qui, en tant que collaborateur des services de renseignements marocains, avait reçu l’ordre de rejoindre l’État Islamique en Irak. Dans ses tentatives, il a été arrêté par les autorités libyennes et syriennes et libéré grâce à l’intervention des autorités marocaines. Une fois de retour au Maroc, il a reçu l’ordre de déposer une bombe au Café Argana.

Dihani affirme avoir rencontré un groupe des marocains inculpés de tentative d’attentat contre la base américaine de Tan-Tan. Toute en proclamant leur innocence, ils affirment avoir été manipulés.

Annexe :

Avis adoptés par le Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire de Mohamed Dihani

Imagina que eres Mohamed Dihani, Observatorio aragonés para el Sahara Occidental

El inquietante caso del «terrorista» y supuesto yihadista saharaui Mohamed Dihani, Espacios Europeos

Tags : Sahara Occidental, Front Polisario, Mohamed Dihani, Maroc, menace terroriste, terrorisme, manipulation, instrumentalisation, services secrets marocains,

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