Algérie : Le grand retour de la diplomatie algérienne à la médiation internationale

Le chef de la diplomatie algérienne, Sabri Boukadoum, a reçu, hier, son homologue émirati Cheïkh Abdullah Bin Zayed Al Nahyan, qui a pu s’entretenir également avec le Premier ministre Abdelaziz Djerad. Le communiqué des Affaires étrangères au sujet de cette visite est laconique.

Il indique qu’il s’agit d’« évaluation de la coopération bilatérale », mais glisse également qu’il est question pour le ministre algérien, M. Boukadoum, et son hôte, d’« échanger autour des questions régionales et internationales d’intérêt commun, notamment la situation en Libye ».

Ce pays voisin où, ce n’est un secret pour personne, les Emirats jouent la carte du maréchal autoproclamé Khalifa Haftar et sont donc considérés parmi les pays étrangers s’ingérant dans les affaires libyennes, sans doute même parmi ceux qui continuent, selon l’avertissement de la mission onusienne en Libye, la Manul, avant-hier dimanche, de violer l’embargo sur les armes et d’acheminer des armes et des équipements au bénéfice de l’homme fort de la Cyrénaïque.

En attendant des indications relatives à ce contact entre les diplomaties algérienne et émiratie sur la question libyenne précisément, qui est sans doute le premier, officiellement, depuis plusieurs mois déjà, le fait que le ministre Abdullah Bin Zayed Al Nahyan fasse le déplacement à Alger confirme le retour de l’Algérie à son action diplomatique traditionnelle et prestigieuse : celle d’un médiateur international, cette fois-ci en particulier sur le terrain sahélo-maghrébin où la réputation qui lui est prodiguée est d’y disposer d’une connaissance et d’une expertise susceptibles de maîtriser, voire d’apaiser et de stabiliser des conflits complexes comme ceux qui empêchent la normalisation politico-institutionnelle en Libye et au Mali dont la question a justement été évoquée hier par le ministre français des Affaires étrangères.

Lors de ses vœux à la presse au Quai d’Orsay, Jean- Yves Le Drian, a semblé confirmer le retour de la diplomatie algérienne à son rôle de médiateur et au paradigme qui fait sa singularité au moins depuis la négociation de la libération des otages américains en Iran en 1980. « J’ai pu constater lors de mes entretiens (le 21 janvier à Alger) et avec mon homologue Sabri Boukadoum et avec le président Abdelmadjid Tebboune la volonté d’être beaucoup plus actifs dans le règlement de la crise malienne et de la crise du Sahel ».

Retour diplomatique sur la scène malienne

«Pendant très longtemps, l’Algérie n’était pas vraiment présente dans ces discussions» autour du suivi de l’accord de paix, a relevé le ministre français des Affaires étrangères. «J’ai le sentiment d’une volonté de coopérer de manière beaucoup plus forte avec l’ensemble des acteurs qu’auparavant et c’est un signe très, très positif », a-t-il ajouté. « On a même envisagé que nous puissions aller ensemble M. Boukadoum et moi-même à un prochain CSA (comité de suivi de l’accord) pour manifester notre volonté de faire en sorte qu’il puisse être mis en œuvre », a-t-il précisé.

Le 19 janvier dernier, le secrétaire d’Etat auprès du ministre des Affaires étrangères, chargé de la Communauté nationale et des compétences à l’étranger, a présidé à Bamako où il était en visite la 4e réunion de Haut niveau du Comité de Suivi de l’Accord (CSA) pour la Paix et la réconciliation au Mali, issu de l’accord d’Alger de 2015. Rachid Bladehane y a souligné « l’importance de tout entreprendre en vue d’accélérer la mise en œuvre de l’Accord qui reste la seule option pour un retour définitif et durable de la paix et de la stabilité au Mali », selon un communiqué des Affaires étrangères. La réunion de Bamako (la première depuis septembre 2019) a, selon la même source, permis de « définir les principales questions devant figurer à l’ordre du jour de la prochaine réunion du CSA. Il s’agit entre autres de relancer l’accord de paix d’Alger et discuter notamment du retour des soldats maliens à Kidal, ville du Nord aux mains d’ex-rebelles touaregs, et du désarmement de groupes rebelles et leur intégration dans les forces de défense maliennes.

Reportersdz, 28 jan 2020

Tags : Algérie, diplomatie, Libye, Sahel, Mali, Azawad, Barkhane,