Élections en Espagne : le PSOE et le Sahara occidental

Pas en notre nom, pas avec notre voix

Luis Portillo Pasqual del Riquelme*

Le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) déclare dans son programme électoral pour les élections du 28 avril qu’il encouragera l’autodétermination du peuple sahraoui et s’emploiera à encourager la surveillance des droits humains.

Ne vous laissez pas berner. Non seulement le PSOE n’a rien fait pour le peuple sahraoui, mais il a travaillé dur, et dans l’ombre, contre ses droits et ses intérêts.

La cause sahraouie a servi à Felipe Gonzalez pour arriver au pouvoir avec de fausses promesses, avec lesquelles il a réussi à mobiliser une bonne partie de l’électorat. Le 14 novembre 1976 (premier anniversaire de la signature des fameux Accords tripartites de Madrid), il se rendait dans les camps de réfugiés sahraouis de Tindouf, où il déclarait : « notre parti sera avec vous jusqu’à la victoire finale ». Il a vite oublié ces mots. Et Mariem Hassan pleura amèrement sa trahison dans « Shouka » (L’Épine). Finies les manifestations socialistes avec des drapeaux sahraouis.

Alors qu’Alfonso Guerra déclarait à un journaliste qui l’interviewait que le Front Polisario avait « perdu des appuis », il tut, cependant, que c’était précisément le PSOE qui lui avait retiré le sien.

Et Felipe González – pour autant que l’on sache – s’est rendu en Amérique latine pour empêcher plusieurs gouvernements sud-américains de reconnaître la République Sahraouie (RASD).

Le ministre des Affaires étrangères de l’époque, Miguel Ángel Moratinos, a eu un contact direct avec le monarque alaouite (comme l’a déclaré Ali Lmrabet lui-même) et a cédé sans problème au chantage alaouite, permettant la déportation d’Aminetu Haidar aux îles Canaries, au lieu de demander son retour dans sa patrie sahraouie.

Trinidad Jiménez, également récompensée par le ministère des Affaires étrangères, s’est cyniquement abstenue de condamner le démantèlement brutal du campement sahraoui de Gdeim Izik par les forces d’occupation marocaines, en terre sahraouie même, à quelques kilomètres d’El Ayoun, la capitale, sous les yeux du monde entier malgré la stricte censure des médias imposée par l’occupant marocain. Et elle a honteusement justifié l’invasion et l’occupation du Sahara occidental par le Maroc au motif qu’elles avaient été menées par « un traité légal » (les accords tripartites illégaux et illégitimes de 1975).

L’ancien président du gouvernement José Luis Rodríguez Zapatero s’est rendu dans la ville occupée de Dakhla pour se faire photographier devant la photo du roi occupant Mohamed VI et la carte du Sahara occidental annexée au Maroc derrière son dos, lors du Forum de Crans Montana, une propagande boycottée par l’Union européenne, l’Unesco, l’Union africaine et même l’ONU elle-même, qui, comme on le sait, maintient la MINURSO (Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental) au Sahara occidental depuis 1991. Les sessions du Forum susmentionné à Dakhla occupé servent au monarque alaouite à attirer et à divertir des agents d’influence, des universitaires, des stars, des (non)experts et des présumés corrompus pour tenter effrontément de blanchir et de légitimer l’occupation coloniale illégale. Même le ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel García Margallo, du Parti populaire (droite) devait rappeler à Rodríguez Zapatero que la tenue de « réunions internationales dans les territoires occupés est illégale selon le droit international » et « en contradiction avec les efforts de la communauté internationale pour résoudre le conflit au Sahara occidental ». Mais bon, il est aussi illégal d’envahir et d’occuper les territoires d’autres peuples ; et une fois qu’ils sont au pouvoir,… Qu’ils n’essaient pas alors de nous tromper avec leurs promesses électorales. En fin de compte, le PSOE et le PP, lorsqu’ils sont arrivés au pouvoir, se sont tous deux désengagés de la cause sahraouie.

Et avec le gouvernement de Pedro Sánchez, son ministre Josep Borrell a fait l’impossible pour que le Parlement espagnol interdise à ses députés – représentants de la souveraineté populaire – de débattre de la situation du Sahara occidental – ex-colonie et ancienne province espagnole encore à décoloniser – afin de ne pas déchaîner la colère du tout-puissant roi du Maroc.

Le PSOE n’a jamais dit un mot sur les farces judiciaires contre les prisonniers sahraouis de Gdeim Izik (huit condamnés à la prison à vie et d’autres à vingt ans de prison) – sans parler de leur participation en tant qu’observateurs impartiaux-, n’a ni élevé la voix contre la répression systématique des manifestations sahraouies dans les territoires occupés, ni protesté contre la situation des prisonniers politiques sahraouis et la violation permanente de tous les droits usurpés de ce peuple (que le roi émérite Juan Carlos a dit vouloir protéger parce que c’était une obligation pour l’Espagne !). Il ne s’est même pas plaint publiquement de l’invasion de pateras avec laquelle le Makhzen fait chanter l’Espagne et l’Europe entière.

Bien au contraire, les dirigeants du PSOE n’ont pas mùanqué de bénir ici et là le plan d’annexion marocain et de se précipiter à Bruxelles pour soutenir le pillage continu des ressources naturelles sahraouies, qui va à l’encontre d’ arrêts répétés de la Cour européenne de justice (CEJ).

Par ailleurs, à l’occasion de la récente visite du roi Philippe VI au Maroc, ils ont non seulement caché à l’opinion publique espagnole et internationale la gravité des exactions commises par les forces d’occupation marocaines sur la population et le territoire sahraouis, mais ils ont également consacré leurs efforts, du Conseil d’Etat, à flatter avec des flagorneries le responsable principal de cette situation.

Voilà grosso modo l’apport du PSOE à la cause sahraouie. Comment osent-ils dire que ce parti va promouvoir l’autodétermination du peuple sahraoui et œuvrer à la promotion de la surveillance des droits humains ? Il n’a même pas sorti ses militants ou sympathisants pour la manifestation annuelle du 14 novembre (anniversaire de la signature des accords tripartites) à Madrid ! Où, dans quels événements, dans quels médias, avec quels supports, dans quels débats, dans quels centres de décision le PSOE a-t-il soutenu la liberté et la justice pour le peuple sahraoui ?

« On reconnaît l’arbre à ses fruits », dit l’Évangile, ce à quoi on pourrait ajouter : « Les actes valent mieux que les paroles ».

Ainsi, lors des élections générales du 28 avril, le geste cohérent sera de voter pour les partis* qui, par leur action (et non par de fausses promesses) ont montré qu’ils soutiennent et continueront à soutenir la noble et légitime cause sahraouie ; une cause qui a la sympathie et la reconnaissance d’une majorité de la population consciente et solidaire et dans laquelle l’Espagne a une énorme responsabilité historique, politique, juridique et éthique.

NdT

*Un examen des programmes des six listes en lice à l’échelle de tout l’État espagnol montre qu’une seule exprime un appui clair et net à la cause sahraouie, celle d’Unidas Podemos.

Source : Tlaxcala 

*Luis Portillo Pasqual del Riquelme es doctor en Ciencias Económicas, ex profesor de Estructura e Instituciones Económicas en la Universidad Autónoma de Madrid, ex jefe de Redacción del Boletín Económico de ICE y ex responsable de Estudios Económicos e Investigación en Información Comercial Española. Revista de Economía (España). Autor de ¿Alimentos para la Paz? La “ayuda” de Estados Unidos (IEPALA, Madrid, 1987). Miembro de Comisiones obreras y de ATTAC Madrid. Incansable defensor de la causa del pueblo saharaui.

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