Le monde se referme : la carte des murs aux frontières

Mur à la frontière mexicaine au coeur des débats de la présidentielle américaine, multiplication des barrières anti-migrants en Europe… Les murs, barrières ou clôtures pullulent depuis quelques années : cartographie de la fortification des frontières, et analyse d’un monde de plus en plus fermé.

65 murs construits et planifiés, soit 40.000 km de long, ou la circonférence de la terre
Circulez dans cette carte qui représente les murs construits et utilisés aujourd’hui, survolez ou cliquez sur les pays pour obtenir des informations concernant les dates de construction des murs, les principales raisons invoquées et les éventuels autres murs prévus par pays :

Source : Elisabeth Vallet, Chaire Raoul-Dandurand, Université du Quebec, Montréal, AFP, RFI, Courrier international, Wikipedia. NB : les tracés ne reflètent pas la longueur ou la localisation précise des murs et barrières, mais indiquent les frontières concernées. Cliquez ici pour voir la carte en grand

« On assiste à un phénomène de refermeture des frontières, depuis deux décennies », qui s’est accéléré ces derniers mois, notamment en Europe, analyse Elisabeth Vallet, interrogée par Thierry Garcin dans « Les Enjeux internationaux« . « Le barbelé est un produit très en demande en ce moment ». Les matériaux (béton, électrification, sable…), les dispositifs (miradors, clôture discontinue ou non, quartiers séparés, forces militaires, technologie biométrique…), donc les coûts, les objectifs (lutte contre l’immigration, la contrebande, raisons de sécurité ou contentieux territorial…) et l’efficacité des différents murs sont particulièrement contrastés d’un pays à l’autre. Mais toutes ces fortifications signalent un même phénomène : une logique de fortification de la frontière. Alors que les « vieux murs » servaient à éviter que les conflits ne dégénèrent (Chypre, Inde / Pakistan, les deux Corées…), aujourd’hui, il s’agit de blinder la frontière, d’en faire une « sur-frontière ».
A écouter : « Israël derrière ses murs« , Le Magazine de la rédaction, 4 mai 2012
La moitié des murs actuels ont été construits après 2010, et encore la moitié de plus sont planifiés
Circulez dans la carte, survolez ou cliquez sur les frontières pour obtenir des informations sur les pays en jeu (le pays initiateur est indiqué en premier), zoomez et dézoomez avec le bouton +/- :

_Source : Elisabeth Vallet, Chaire Raoul-Dandurand, Université du Quebec, Montréal, AFP, RFI, Courrier international, Wikipedia_.Cliquez ici pour voir la carte en grand

Elisabeth Vallet identifie quatre principaux problèmes, paradoxes ou apories, causés par les murs :
Les murs ne servent à rien car ils induisent des logiques de transgression. On a dénombré 150 tunnels sous la frontière mexicano-américaine. Les trafiquants contournent les murs et barrières par la mer avec des sous-marins ou par les airs avec des drones… Ces stratégies de contournement sont multiples, de plus en plus sophistiquées et dangereuses à mesure que les murs se renforcent. 
Les murs viennent fracturer une zone transfrontalière, donc déstructurer une économie locale.
Alors que les passages de frontières pouvaient être pendulaires, saisonniers, temporaires – on pouvait revenir en arrière, retourner dans son pays d’origine, ces murs empêchent paradoxalement ceux qui les ont franchis de ressortir du pays où ils sont indésirables. 
Les murs « invitent les mafias à la table de la frontière ». On ne peut plus franchir un mur sans faire appel à des structures criminelles, et de plus en plus criminalisées. Un problème plus grave que celui qu’on avait à l’origine est ainsi créé. 
Ecoutez trois émission des Enjeux internationaux consacrées aux murs : 
« Frontières. La multiplication des murs et autres barrières dans le monde« , 31 mai 2016, avec Elisabeth Vallet : Ces murs ont des justifications, des fonctions, des efficacités très diverses. Ils illustrent bien le fait qu’on est loin de l’idéologie des années 80 selon laquelle il n’y a plus de souveraineté, plus d’État, plus de frontières, et que tout serait devenu interactions entre partenaires gentiment mondialisés :
« Frontières. La multiplication des barrières et lignes de séparation dans le monde« , 11 mars 2015, avec Stéphane Rosière, professeur à l’université de Reims : Qu’il s’agisse de clôture, de grille, de ghetto, de zones de non-droit, de no man’s land , de zones démilitarisées (entre les deux Corée), etc. Discontinues ou non, urbaines ou non, pourquoi pullulent-elles ?

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